La péréquation canadienne et l’opinion de l’ouest sur le Québec

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Date: 14 décembre 2017
Auteur: Daniel Nadeau

Tout dans ce pays est prétexte au débat. Parmi les questions délicates, il y a la question de la péréquation. Ces dernières années, cette mesure qui vise à aider chacune des provinces canadiennes à assurer la même qualité de services publics de base sans égards à la capacité fiscale de chacune. Le journaliste et animateur Gérard Filion donnait hier, à son émission d’affaires économiques sur les ondes de Ici RDI, des explications fort pertinentes sur cette question.

Dans une fédération comme le Canada, la péréquation est un système de transfert d’impôt permettant d’équilibrer la richesse des habitants des différentes provinces et des territoires. Le gouvernement fédéral prend cet argent à même les impôts payés au gouvernement du Canada par les citoyennes et les citoyens de chaque province. En gros, on comprend que les habitants des provinces ayant les plus grandes capacités fiscales, les provinces les plus riches paient une plus grande part d’impôt alors que les habitants des provinces les moins fortunées en paient moins. C’est une forme d’impôt à table progressif entre les habitants des provinces si l’on veut faire une image forte bien qu’elle ne soit pas tout à fait juste.

Tout cela pour dire que le Québec recevra cette année plus de onze milliards en vertu de ce programme soit une hausse d’environ huit cent cinquante à neuf cents millions de dollars. Ce qui fera le bonheur, j’en suis persuadé du ministre des Finances Carlos Leitao du gouvernement libéral de monsieur Couillard. Cela permettra au gouvernement d’être encore plus généreux dans cette année préélectorale.

Si je vous parle de péréquation aujourd’hui c’est que cela fait débat au Canada et que c’est l’un des angles par lequel le Rest of Canada, le ROC, attaque le caractère distinct du Québec. Par exemple, on invoque la péréquation comme outil de troc pour que l’on renonce à nos principes en matière environnementale comme ce fut le cas dans le dossier du pipeline Énergie Est. On décrie le fait que le gouvernement du Québec ait choisi de se donner des programmes sociaux et un système de garderie publique et on crée l’illusion que c’est les autres provinces qui paient pour nos programmes plus généreux. Tout cela n’est qu’illusion. Nous n’aurions pas ces programmes que nous recevrions les mêmes sommes. La péréquation n’a rien à voir avec le coût de nos programmes ou de celui des provinces, mais avec la capacité fiscale des provinces. C’est une politique basée sur les revenus des provinces et non pas sur les dépenses.

L’autre débat est plus québécois. C’est celui lancé par le chef de la Coalition Avenir Québec, François Legault, qui a lancé que nous ne devrions pas être fiers de recevoir des paiements de péréquation et souhaitait que l’on se donne pour objectif à long terme, et non pas durant un mandat de quatre ans comme l’a affirmé, Philippe Couillard hier dans un point de presse, de ne plus recevoir de paiement de péréquation. En fait, François Legault disait en d’autres mots que nous devrions être collectivement plus engagés à créer de la richesse au Québec plutôt que de nous satisfaire de la situation actuelle. La péréquation est un faux débat, quant à moi, dans l’opinion publique et c’est un programme distinctif de la fédération canadienne parmi les démocraties avancées. C’est une bonne idée d’assurer un minimum de services de base sur tout le territoire canadien. C’est aussi une bonne idée de débattre au Québec de moyens pour créer plus de richesses, développer plus d’entreprises et susciter de l’entrepreneuriat. La seule mauvaise idée c’est d’accepter que l’on se serve de l’arme de la péréquation pour réduire de plus en plus le Québec à une province comme les autres alors que ce territoire est le siège de la nation québécoise francophone d’expression française et qu’avec des gens issus de plusieurs communautés nous formons une société distincte en Amérique du Nord. Nous sommes une nation et c’est une foutue bonne idée de devenir une nation plus riche et plus juste dans les prochaines décennies.

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