Idées reçues : Immigration et opinion publique
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Date: 18 mai 2018Auteur: Daniel Nadeau
C’est bien connu. Certains sujets font exploser les opinions dans l’espace public. Parmi ces sujets chargés d’émotion, il y a bien sûr la question de l’immigration. Au Québec, depuis la déclaration de Jacques Parizeau lors de la défaite du camp du Oui au référendum de 1995 disant que la défaite souverainiste était attribuable « à l’argent et des votes ethniques », nous sommes devenus sensibles à la question du « Nous » et des « Eux ». Il y a eu aussi l’épisode d’Hérouxville suivi de la Commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables, les débats sans fin sur les symboles religieux, les débats sur la laïcité et bien sûr la fameuse charte des valeurs du Parti québécois. Cela n’a rien à voir avec l’immigration ou si peu, mais c’est qui rend le débat impossible sur une question pourtant simple : En vertu de nos besoins démographiques et économiques, il est clair qu’à l’image de plusieurs pays aux économies avancées, nous ne faisons plus assez d’enfants, combien de nouveaux arrivants devons-nous accueillir pour soutenir notre développement?
Question simple, mais qui prend l’aspect d’un psychodrame identitaire au Québec. Pourtant, nous avons des politiques claires en ces matières et des critères précis pour choisir les nouveaux arrivants qui se joignent à nous. Même c’est le Québec qui fait le choix de ses immigrants. Alors pourquoi tout ce bruit autour de la politique de la Coalition avenir Québec sur la question de l’immigration?
Une politique pourtant simple et raisonnable. Choisir les immigrants en fonction des besoins de nos entreprises aux prises avec une pénurie de main-d’œuvre. S’assurer de la francisation des gens que nous allons accueillir chez nous, car la langue officielle et du travail au Québec est le français. Veiller à ce que les gens que nous allons accueillir chez nous partagent le socle de nos valeurs qui sont en fait des valeurs universelles : égalité entre les hommes et les femmes, politique de non-discrimination envers les minorités visibles ou sexuelles, etc. Enfin, veiller à ce que ces nouveaux Québécois soient bien intégrés à la société d’accueil. Cela m’apparaît hautement raisonnable.
Qui plus est, la Coalition avenir Québec s’engage à reconnaître à ces nouveaux Québécois la francisation comme un droit et promet d’ajouter des ressources financières suffisantes pour que l’intégration soit un succès. La CAQ veut aussi réussir la régionalisation de l’immigration. Pas sorcier tout cela. Elle ajoute qu’en ce moment, la régionalisation est un échec, la francisation connait des ratés et l’intégration à l’emploi est caractérisée par un taux de chômage trois à quatre fois plus élevé que dans la population québécoise. En attendant de rétablir la situation, de réussir notre immigration, la Coalition avenir Québec décrète qu’il faut diminuer le nombre d’immigrants de 10 000 personnes par année et ajoute qu’après une certaine période les gens accueillis chez nous qui ne parleront pas notre langue, seront étrangers à notre culture commune partagée et ne feraient pas d’efforts pour occuper un emploi ne pourront demeurer chez nous et obtenir la citoyenneté canadienne munie du certificat québécois confirmant notre intérêt à l’accueillir chez nous.
Les intentions sont bonnes, mais les moyens sont à peaufiner. Par exemple, il faut mieux choisir nos immigrants. On ne nous dit pas quels seront les nouveaux critères. Il faut rouvrir l’entente sur l’immigration avec le gouvernement du Canada afin d’y introduire la notion de certificat temporaire probatoire de trois ans avant de pouvoir obtenir son statut de résident permanent, puis de citoyen du Canada. Il faut faire en sorte que les nouveaux arrivants aillent dans les régions du Québec. On pourrait ainsi assigner par exemple un nombre d’immigrants maximal par région administrative du Québec et penser à accorder des points pour le choix des régions ciblés par le gouvernement. Enfin, le nombre d’immigrants reçus au Québec chaque année devrait être lié par des critères objectifs soumis à notre taux de réussite. Plus notre taux de rétention est haut, plus on accueille de nouveaux arrivants, etc.
Bref, mettre des balises et discuter de l’immigration n’est pas un crime, ce n’est non plus un acte raciste ou xénophobe. Les bien-pensants veulent faire croire que tout va pour le mieux alors que le taux de chômage est plus élevé chez les immigrants que dans la population québécoise, que les immigrants sont concentrés à Montréal et que l’on retrouve très peu dans les régions. Ce sont là des idées reçues qui sont fausses lorsque soumises au test de la réalité.
Le plus important c’est que l’on débatte sereinement de cette question, car les immigrants sont une richesse pour le Québec et que nous en avons grandement besoin. Il faut distinguer l’immigration économique des réfugiés. C’est une tout autre question qui mériterait un autre débat.