Les sondages : pourquoi sont-ils parfois dans le champ?
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Date: 8 juillet 2016Auteur: Daniel Nadeau
La professeure de l’Université de Montréal, madame Claire Durand, a livré des propos fort éclairants au journaliste Marco Fortier du journal Le Devoir quant au « dur lendemain de veille » des maisons de sondages britanniques au lendemain des résultats du Brexit.
Pour le professeur Durand, les sondeurs se sont tous trompés dans leurs prédictions des résultats du référendum sur la sortie ou le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne à cause de trois facteurs principaux :
- La sous-estimation de la participation au vote des personnes plus âgées par rapport aux plus jeunes. On sait que les moins de 34 ans ont voté dans une proportion de 4 personnes sur 10 alors que ce rapport pour les 60 ans et plus était de 8 personnes sur dix. Comme les personnes de 60 ans et plus étaient plutôt favorables à l’option « Leave », ceci explique cela;
- Les personnes favorables à l’option « Leave » se faisaient plus discrètes, surtout après la mort de la députée Cox, lors des sondages d’opinion. Ils étaient en quelque sorte la « prime à l’urne » du camp Brexit;
- La faiblesse de l’échantillonnage doit aussi être pointée du doigt. Depuis que les gens ont délaissé leur ligne téléphonique terrestre, les maisons de sondage font de plus en plus appel à des échantillons non probabilistes que leur donne le Web, mais ce type d’échantillonnage est beaucoup moins fiable pour faire des prédictions que les anciennes bonnes vieilles méthodes des sondages téléphoniques. Aujourd’hui, à peine une personne sur dix accepte de répondre aux sondages par téléphone. C’est tout dire.
Pour la spécialiste de l’analyse des sondages de l’Université de Montréal, la conclusion est simple : « Je pense que les sondages d’opinion Web vont devoir s’améliorer. Le Web est devenu le mode de communication. On ne peut plus miser sur les sondages téléphoniques. Il commence à être temps qu’on s’arrête et qu’on se demande comment créer des échantillons probabilistes » (Le Devoir, lundi 4 juillet 2016, PA 8)
Pour Claire Durand, il n’y a pas de doute possible, les maisons de sondage doivent s’améliorer et raffiner leurs méthodes. Il en va de leur survie comme entreprise : « Les sondeurs ont intérêt à raffiner leurs méthodes parce qu’ils sont des gens d’affaires et qu’ils risquent leur peau aux élections. » (Le Devoir, loc. cit.)
Il importe que les sondeurs fassent une prise de conscience salutaire puisqu’il est désormais acquis que les électeurs en cette ère de « merchandising » sont de plus en plus volages, imprévisibles et surtout désenchantés. Les sondeurs ne le savent que trop bien, la classe politique aussi. C’est pourquoi la politique et ses enjeux sont aujourd’hui une marque comme une autre et les méthodes et les techniques de persuasion de l’opinion publique empruntent de plus en plus au « branding »…