La déconstruction identitaire
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Date: 14 mai 2019Auteur: Daniel Nadeau
Nous vivons une époque où l’on veut par nos bonnes intentions réécrire des pages d’une histoire moins glorieuse. Il en est ainsi des excuses faites par les États à l’endroit de communautés ayant été victimes d’injustices ou pire encore de gestes meurtriers comme les juifs d’Allemagne lors de l’époque nazie.
C’est aussi une époque où nous portons très haut le flambeau de nos principes qui devraient se traduire dans les faits. Par exemple, ces dernières années on a beaucoup dénoncé le racisme et la discrimination dont sont victimes plusieurs citoyennes et citoyens au Québec particulièrement les personnes de couleur et les musulmans. On a aussi dénoncé les violences faites aux femmes et mis au banc des accusations le système de justice qui dans des causes comme le viol ou le harcèlement sexuel défavorisait les victimes et permettait aux coupables de s’en sortir.
C’est aussi une époque où l’on dénonce l’appropriation culturelle. Qu’est-ce que c’est l’appropriation culturelle? Voici une définition claire de Judith Lussier dans le Huftington Post : « Le concept d’appropriation culturelle s’avère utile pour illustrer l’arrogance – ou l’inconscience – avec laquelle des membres d’un groupe dominant s’approprient sans vergogne les codes culturels et/ou spirituels d’un groupe opprimé, de manière caricaturale, et le plus souvent sans que le crédit ne soit attribué. »
En vertu de ce concept qui veut déconstruire la culture de domination héritée de nos civilisations, pratiquer le Yoga, manger du spaghetti peut apparaître comme des gestes inconvenants et s’apparentant à des gestes d’appropriation culturelle. Judith Lussier pose une bonne question : « Est-ce que cela signifie que nous devrons bientôt renoncer à manger du spaghetti, à porter des kimonos ou à écouter du rap? Le cas échéant, le concept d’appropriation culturelle perdra-t-il des défenseurs, à force de vouloir élargir ses frontières? » Au fond, tout est une question d’équilibre. Reconnaître la richesse de la diversité culturelle et vivre le métissage n’est pas un geste d’appropriation culturelle, mais plutôt un geste d’hospitalité à l’autre. Il faudra garder cela à l’esprit.
C’est un peu la même chose avec la volonté d’écrire une langue épicène, délivrée de ses connotations sexistes et discriminatoires. C’est une bonne idée de faire évoluer la langue vers des horizons dégagés de ses vieux démons, mais la question pratique qui vient c’est : comment y parvenir alors qu’une majorité de gens peinent à écrire et à parler le français. On voudrait leur apprendre une nouvelle langue sans masculin ni féminin. Il est connu qu’une des langues les plus neutres du point de vue du genre est la langue anglaise. Nous pourrions tous nous y mettre. On règlerait ainsi la discrimination envers un genre par la disparition d’une civilisation. Il fallait y penser! D’autant que la civilisation française a colonisé de larges parties du monde, dont l’Afrique…