Les fauves de l’opinion publique
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Date: 13 octobre 2017Auteur: Daniel Nadeau
Les journalistes de la colline parlementaire rattachés à l’actualité québécoise sont impitoyables. Ils ne laissent aucune chance à la classe politique. Se réclamant de la vertu, ils se disent garants de la démocratie. Ils sont comme les fauves de l’opinion publique. La moindre erreur d’un politicien peut ruiner tous ses efforts de communication en un clin d’œil. Cela peut devenir une source de frustration énorme pour la classe politique et se traduire par des attaques envers les médias. Ça s’appelle tirer sur le messager.
Hier, c’est un peu le piège dans lequel est tombé le premier ministre libéral Philippe Couillard avec les correspondants des médias de la colline parlementaire québécoise des différents médias. Pris dans une mêlée journalistique, le premier ministre Couillard entouré de plusieurs de ses ministres devait répondre aux principales critiques des médias quant à son remaniement ministériel : peu de changements autres qu’esthétiques puisque la majorité des ministres influents n’ont pas bougé, le remaniement de son cabinet est si près des élections que ses nouveaux ministres n’auront pas le temps de faire quoi que ce soit d’important, des critiques infondées sur la nomination du jeune Fortin comme ministre des Transports, sa piètre performance dans la livraison de son discours à la suite de la présentation du conseil des ministres.
Monsieur Couillard, notre premier ministre, était visiblement excédé par toutes ces questions et par les critiques qu’il avait lues. Il a comme on le dit en bon québécois « pété sa coche » en reprochant aux médias de ne vouloir que du sang et de la chair, de chercher des histoires avec des drames humains. Bref, de mal faire leur travail et de rechercher le spectaculaire. Monsieur Couillard est bien mal avisé de s’en prendre aux médias et à leur travail. Ses critiques et observations ne sont pas dénués de tout fondement, mais à ce jeu les médias et les journalistes sortent toujours gagnants au détriment des politiciens. C’est un jeu dangereux auquel s’est livré le premier ministre Couillard hier. La hargne des fauves est inhérente à la fonction. Il faut apprendre à vivre avec, pour le meilleur et bien souvent pour le pire.
Il est vrai que de nombreuses critiques formulées par les représentants des médias sont injustes à l’égard du gouvernement et de monsieur Couillard. C’est étonnant de voir l’impatience qu’ils ont à vouloir que les nouveaux titulaires des ministères se prononcent sur les enjeux les plus délicats. Le ministre Heurtel sur le sort réservé à la consultation sur la discrimination systémique et le racisme, le ministre Moreau sur son opinion sur l’exploitation du pétrole en territoire gaspésien, et tutti quanti. On refuse aux nouveaux ministres le moindre temps pour prendre connaissance de ses dossiers et pour se faire une tête sur ses nouvelles responsabilités. Cela peut-être frustrant pour monsieur Couillard.
Le jeu politique est impitoyable. Ce n’est pas l’auteur de ce blogue qui va l’apprendre à monsieur Couillard et aux libéraux. La nouvelle situation concernant la date d’élection qui est déjà connue crée en plus un contexte politique de campagne électorale permanente. On l’a constaté hier quand on a pris la mesure des critiques des oppositions sur le remaniement ministériel qui n’ont pas laissé une minute aux nouveaux titulaires de ministères pour célébrer leurs nouvelles responsabilités. On est passé tout de suite à l’attaque. Vraiment pas facile la politique.
Pourtant, ce qu’un politicien expérimenté comme Couillard aurait dû faire, c’est gardé son calme, mettre la lumière sur les nouveaux membres de son conseil des ministres. Par sa saute d’humeur, le premier ministre Couillard a changé le centre d’intérêt de la caméra et a retourné les projecteurs sur sa propre personne. Il ne s’est pas aidé et aura lui-même contribué à raccourcir la durée de vie de sa « bonne nouvelle ». Il vient de perdre l’avantage de l’agenda par sa propre faute.
Impitoyable la vie politique pour celles et ceux qui veulent conquérir l’opinion publique. Monsieur Couillard vient d’en faire une démonstration supplémentaire hier.