Impitoyable tribunal de l’opinion publique

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Date: 19 octobre 2017
Auteur: Daniel Nadeau

Hier matin, La Presse +. lançait une bombe. Éric Salvail, selon des allégations anonymes pour la très grande majorité, se serait rendu coupable d’inconduite sexuelle au cours des quinze dernières années. Cette nouvelle a fait beaucoup parler. C’était la nouvelle hier dans tous les médias. Journalistes, commentateurs et analystes, nous n’en avions que pour l’affaire Salvail. C’est facile à comprendre Éric Salvail est une entreprise à lui seul. Une icône de notre industrie du show-business. Producteur, animateur et personnalité médiatique et homme d’affaires avisé, Éric Salvail est le symbole parfait de la progression sociale par l’industrie du spectacle. Ceci explique cela.

Au-delà de l’intérêt pour Salvail, il y a aussi le contexte dans lequel cette affaire prend racine. Après l’affaire Weinstein, l’un des derniers grands magnats d’Hollywood, on ne pouvait que prêter l’oreille à l’affaire Salvail. En prime, les victimes alléguées de ses possibles inconduites sexuelles sont des hommes et non pas des femmes. Nous entrons dans la question des abus d’autorité et de l’exercice d’un pouvoir malsain dans une nouvelle dimension, celle de l’abus au-delà des orientations sexuelles. Éric Salvail étant un membre assumé de la communauté homosexuelle québécoise.

Nonobstant de l’intérêt de la question et de l’angle nouveau par lequel celle des abus de nature sexuelle est posé, il n’en reste pas moins que l’on peut être interpellé par la violence des réactions du tribunal de l’opinion publique. Sous la pression du politically correct qui domine notre époque caractérisée par la fluidité des réseaux sociaux et des communications interactives, les employeurs, partenaires et grandes corporations se sont tous distancés hier en moins de 24 heures d’Éric Salvail. La présomption d’innocence n’existe plus. Éric Salvail a été condamné par La Presse+ et c’est suffisant pour qu’il soit devenu un pestiféré. De lourdes responsabilités pour les auteurs de cette enquête journalistique. Ces journalistes, aussi compétents soient-ils, ont donc dans notre monde droit de vie ou de mort sur des personnalités vedettes de notre petit monde médiatique. C’est préoccupant. Nous avons peine à imaginer ce qui adviendrait si le mauvais sort faisait en sorte que l’on pointe les projecteurs sur notre voisin directeur d’une banque ou sur nous-mêmes.

Le tribunal de l’opinion publique est impitoyable et il dispose de la vie des individus en un instant. Au moment d’écrire ce texte, j’apprends en dernière heure que la prochaine victime de cette vindicte populaire sera Gilbert Rozon. Non seulement le tribunal de l’opinion publique condamne sans procès, mais désormais il nous avise de ses prochaines cibles. C’est beaucoup mieux que l’UPAC. On condamne et on exécute sans procès. Vive l’efficacité!

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