Gâchis électoral
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Date: 19 février 2018Auteur: Daniel Nadeau
La nouvelle est tombée samedi après-midi. Les membres du conseil municipal n’auront pas à voter pour donner leur aval au projet Well inc. concocté par l’administration précédente de Bernard Sévigny. Le travail de sape de la dernière campagne électorale autour de ce projet destiné à donner une nouvelle vie au centre-ville de Sherbrooke a réussi. Le projet du consortium du Groupe Custeau n’est plus à l’ordre du jour. Les promoteurs se sont retirés. Quel gâchis!
Un jour, l’ancienne chef du Parti conservateur du Canada, Kim Campell, avait déclaré à l’aube d’une élection que certains sujets étaient trop importants pour être discutés en campagne électorale. Malgré l’étrangeté de ce propos et qu’il porte à faux avec les principes chers à nos démocraties, il y avait du vrai dans cette affirmation et le sort réservé au projet d’investissement Well inc. vient malheureusement y accorder de la crédibilité.
La semaine dernière, j’ai écrit un billet sur ce blogue qui commentait la position délicate dans laquelle se retrouvait le nouveau maire de notre ville, Steve Lussier, quant à l’atterrissage de ce projet alors qu’il a mené sa campagne électorale contre avec des arguments pour la plupart du temps douteux. Le dénouement dramatique du projet sert bien ses intérêts même si ceux de notre ville ne sont pas aussi bien servis.
Au-delà des débats de chiffres et sur les questions éthiques de la présence ou non d’appel d’offres, ce qu’il fallait débattre de ce projet c’est la pertinence ou pas pour notre conseil municipal d’investir des sommes pour relancer le centre-ville de Sherbrooke et pour favoriser le développement de l’entrepreneuriat. La vision qui était sous-entendue par le projet Well inc. a été développée après de nombreuses années de réflexion, d’études et de consultation des citoyennes et des citoyens. Au cœur de ces réflexions et de ces discussions, il y avait le plan 20/20 du développement du centre-ville de Sherbrooke. Ce plan recommandait des investissements importants pour favoriser la renaissance du centre-ville de Sherbrooke. Well inc. n’en était qu’un des aspects touchant le secteur de Wellington Sud. Il y avait aussi la reconstruction du pont des Grandes-Fourches et sa relocalisation afin de favoriser la construction de logements et d’espaces près de la rivière. Ce dossier aussi est à risque avec le présent conseil si l’on en croit le sort réservé au projet Well inc. D’autres aspects touchent le secteur de la rue Alexandre, Aberdeen, etc.
J’entends déjà les thuriféraires de la bonne gestion et des taxes les plus faibles possible argumenter que le centre-ville est un lieu déserté par l’entreprise privée et par la population et que nous ne devons pas investir des sommes importantes pour en assurer la relance. D’ailleurs, l’intersection des rues King et Jacques-Cartier n’est-elle pas le siège du vrai centre-ville à Sherbrooke?
Dans les quarante dernières années, de nombreux gestes ont été posés par les différents conseils municipaux pour redonner vie à notre centre-ville. Il est possible que l’actuel conseil municipal passe à l’histoire comme celui qui marquera un geste de rupture significatif avec cette volonté politique. Cette possibilité est en soi une catastrophe. Malgré notre connaissance fine des enjeux du développement urbain, nous continuons à développer la ville en fonction des intérêts des promoteurs et sans se soucier outre mesure des questions de mobilité durable, d’étalement urbain, de manque de densité urbaine et de rentabilisation des services publics.
Par le retrait du promoteur du projet Well inc., notre conseil est mis devant sa réalité d’avoir en sa possession des études claires, une connaissance fine des enjeux, mais incapable d’en tirer les conclusions qui s’imposent. Nous ne saurons pas si en bout du compte la raison aurait triomphé puisqu’il n’y aura pas de vote sur le projet Well inc. Chose certaine, cela est inquiétant pour le dossier du déplacement du pont des Grandes-Fourches. Les mêmes discours conduisent aux mêmes débats et aux mêmes conclusions.
La seule certitude c’est que l’avenir du centre-ville est maintenant dans le camp de notre nouveau maire Steve Lussier et de ses collègues du conseil. Monsieur Lussier, nous serons heureux de vous entendre et de juger de vos solutions. Quand je dis nous, je pense à de jeunes entrepreneurs énergiques du Centro qui tiennent littéralement le centre-ville à bout de bras, par exemple la résilience et la ténacité d’une Annie Faucher. Néanmoins, il faut se rendre à l’évidence que plus de trente ans de réflexions, de discussion et de débats risquent d’être jetés au panier par ce nouveau conseil municipal. Ce n’est pas rien. Quel gâchis!
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