Les grandes figures oubliées de l’espace public québécois

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Date: 20 mars 2018
Auteur: Daniel Nadeau

Antoine Naaman

Aujourd’hui c’est la Journée internationale de la Francophonie de l’Organisation internationale de la francophonie. On a tendance à l’oublier, mais la langue française est l’une des langues les plus parlées dans le monde avec la langue anglaise. Dans un cahier spécial sur la francophonie publié ce dernier weekend dans Le Devoir, Annick Poitras rappelle : « Du Québec à la Terre de Feu, en parcourant le fief de Trump et les multiples États d’Amérique latine et du Sud, près de 33 millions de personnes parlent le français sur le continent américain. Et c’est sans compter les nombreux francophiles amoureux de la langue de Molière, qui est aussi celle de Gabrielle Roy, une Franco-Manitobaine, et de Dany Laferrière, d’origine haïtienne, pour ne nommer qu’eux. »

La francophonie n’est pas qu’un phénomène américain. Il y a, selon les chiffres tirés du site Web de l’OIF, 274 millions de francophones dans le monde, 84 états et gouvernements en font partie (bien qu’il y ait eu une certaine dérive sur l’aspect du nombre de membres ces dernières années…) et 128 millions d’apprenants français. Le français est la 5e langue la plus parlée au monde, la 3e langue dans le monde des affaires, la 4e sur Internet et la 2e langue des organisations internationales. En Europe, 77 millions de personnes parlent français au quotidien.

Cette journée est un bon moment pour rappeler une figure oubliée importante du Québec qui a joué un rôle majeur dans la diffusion de la littérature francophone partout dans le monde. Il s’agit de l’éditeur et du professeur de l’Université de Sherbrooke, aujourd’hui décédé, Antoine Naaman. Le professeur Naaman a commencé sa carrière à l’Université Legon au Ghana à titre de directeur du département des lettres modernes. C’est en 1966 qu’Antoine Naaman s’installera au Québec pour travailler à l’Université de Sherbrooke en tant que professeur au Département d’études françaises de la Faculté des lettres et des sciences humaines. Il est devenu au fil des ans professeur émérite de cette université.

« Né à Port-Saïd, en Égypte, le professeur Antoine Naaman est le fondateur du Centre d’études des littératures d’expression française. Il a aussi fondé Présence francophone, une revue scientifique consacrée à la littérature et à la langue française hors France. Dans les années 1970, il a créé sa propre maison d’édition, les Éditions Naaman. Le professeur-éditeur a œuvré au Département d’études françaises de la Faculté des lettres et sciences humaines de l’Université de Sherbrooke de 1966 jusqu’à sa retraite en 1985. Ses activités d’enseignant, de chercheur, d’écrivain, de conférencier, de journaliste et d’éditeur ont contribué à la littérature francophone en Estrie, au Québec et dans le monde. » https://www.usherbrooke.ca/a-propos/histoire-de-luniversite/professeurs-emerites/liste-des-professeurs-emerites/n/antoine-naaman/

Terminons ce court texte de rappel de la mémoire d’Antoine Naaman en citant Hedi Bouraoui qui lui rendait hommage dans le bulletin de l’information de l’Université de Sherbrooke Liaison, l’été qui a suivi son décès :

« Fondateur de la revue Présence francophone dans les années 1970 et d’Écriture française dans le monde, il a œuvré pour que les écrivains du monde entier puissent avoir leur voix dans le domaine de la création et de la critique. Antoine Naaman était un être extrêmement généreux, toujours souriant, généreux dans le sens le plus total du terme. Il était doué d’une grande énergie qui lui permettait de répondre à tous les appels, d’où qu’ils viennent. Son dernier ouvrage, Les Légendes pharaoniques, 1986, révèle son amour pour son héritage culturel égyptien, qu’il n’a cessé de partager et d’intégrer dans le patrimoine culturel universel. Nous perdons en Antoine Naaman un ami sincère, promoteur sans précédent de la francophonie, un Canadien dévoué à la cause de la dimension culturelle québécoise, un directeur d’une des plus actives maisons d’édition du Québec. Cette perte n’occulte en aucun cas sa mémoire qui vit et vivra avec les générations à venir. »

Monsieur Bouraoui voit son vœu exaucé par ce court billet écrit aujourd’hui pour rappeler cette grande figure québécoise et canadienne de la promotion de la littérature francophone partout dans le monde. Accueilli par le Québec et par l’Université de Sherbrooke, cet Égyptien d’origine a fait la fierté de notre pays et de notre communauté. Une fierté partagée par sa communauté d’adoption, la Ville de Sherbrooke, qui a nommé dès 1987 une rue en sa mémoire sur son territoire, la rue Antoine-Naaman. Antoine Naaman est décédé le 8 février 1986. Sa maison d’édition (les Éditions Naaman) ne lui a pas survécu, elle a cessé ses opérations en 1987.

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