Les communications et la politique : les slogans

--

Date: 24 août 2018
Auteur: Daniel Nadeau

Pour un spécialiste de communications, la période électorale constitue un laboratoire en temps réel. Du temps où j’étais activement impliqué en politique partisane, je me rappelle comment nous faisons preuve d’audace dans les actions de communication que nous proposions à la classe politique. Souventes fois, nous inaugurions des trouvailles pour mieux positionner des messages et accroître le taux de notoriété ou légitimer des candidats que nous conseillions, messages qui étaient utilisés par la suite auprès de nos clients. Tout cela pour dire que l’arène politique constitue un laboratoire en temps réel pour expérimenter des innovations en communication et en relations publiques.

Peut-être est-ce un signe des temps, mais aujourd’hui, il semble que la politique soit un lieu moins audacieux qu’auparavant sur le plan du marketing. J’en prends à témoin les outils et les différents positionnements des principaux partis politiques en présence dans cette 42e élection qui s’est amorcée hier au Québec.

Commençons par le début, les slogans des différents partis. Nous pouvons constater que les partis en présence n’ont pas choisi des slogans qui passeront à l’histoire. Mieux encore, à une exception près, on comprend que les slogans retenus de trois principaux partis sur quatre, soit la CAQ, Québec Solidaire et le PQ se résument en un seul mot consacrant ainsi la tyrannie des hashtags et des réseaux sociaux sur les positionnements. C’est bien peu un mot pour résumer la personnalité d’une formation politique et son positionnement auprès de la population. L’exception c’est le slogan du Parti libéral du Québec.

Au jeu des comparaisons, c’est le slogan de la Coalition avenir Québec, Maintenant qui semble le plus percutant. Maintenant, c’est le temps de la CAQ, le temps de prendre la décision de rompre avec plus de 50 ans d’alternance entre le PLQ et le PQ. Cela s’inscrit aussi dans un récit narratif que la population peut suivre, Maintenant pour faire plus et mieux. Plus que le PQ et mieux que le PQ. Cela tient la route. Néanmoins, le Maintenant de la CAQ n’a pas la résonnance du Désormais de Paul Sauvé et de l’Union nationale au lendemain du décès de Maurice Duplessis ou encore du Maître chez nous de l’équipe du tonnerre de Jean Lesage.

Au deuxième rang arrive le slogan retenu par le Parti québécois, Sérieusement. C’est un slogan plus songé. Il faut avoir suivi la campagne humoristique du PQ pour en comprendre la substance réelle. Après avoir donné dans la dérision, le PQ dis aux gens soyons sérieux maintenant, la campagne commence. Le problème c’est que les gens ne suivent pas avec autant d’intensité les campagnes électorales que les mordus de la politique et que cet axe de communication risque de ne pas atteindre sa cible. D’ailleurs, il fait contre-emploi d’une certaine manière puisque peu de gens ont reproché à cette formation politique de ne pas faire preuve de sérieux. Bien au contraire, le PQ a toujours eu la réputation d’être un parti politique studieux et peut-être même de se prendre trop au sérieux.

Au troisième rang, c’est l’axe de communication du Parti libéral du Québec qui recueille notre suffrage. Avec une phrase explicite en ligne directe avec les intentions politiques, c’est clair. Pour faciliter la vie des Québécois est clairement la volonté du positionnement du Parti libéral du Québec. On a fait le pari de l’efficacité et renoncé à la tyrannie du hastgag. Il demeure néanmoins que ce slogan sera vite oublié et ne passera pas à l’histoire.

Enfin, le slogan qui apparait le moins performant est celui de Québec solidaire. Avec son Populaire, nous comprenons l’intention des auteurs qui veulent mettre en exergue le fait que Québec solidaire propose des solutions qui sont populaires et que cette formation est liée aux classes populaires. Néanmoins, cela fait contre usage car un parti à 10 % dans les intentions vote est tout sauf populaire auprès de l’opinion publique. D’autre part, le mot Populaire est très près du mot populisme, mot qui ne semble pas avoir la côte en ce moment auprès des commentateurs de la chose politique surtout en cette ère du Trumpisme. Un choix peu judicieux de notre avis.

Quoi qu’il en soit, les slogans choisis par les différentes formations politiques ne passeront pas à l’histoire et ne seront probablement pas retenus par la population comme le furent ces dernières années Les deux mains sur le volant ou le Nous sommes prêts des libéraux de Jean Charest. Cela semble normal puisque la campagne elle-même risque de ne pas passer à l’histoire, car outre le fait que le Québec soit comme un gros hôpital, peu d’enjeux de société y seront vraiment discutés. Nous sommes dans l’intendance et dans les lunchs. Ça va pas si mal au Québec finalement…

Les commentaires sont fermés.