L’aide financière aux médias
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Date: 25 mars 2019Auteur: Daniel Nadeau
Cette semaine, les budgets présentés par le gouvernement du Canada et du Québec ont fait une place à une aide financière accrue aux médias imprimés au Canada. Cela était attendu et l’aide financière annoncée par Québec jeudi dernier concernant la subvention à Recyc-Québec pour la cueillette des journaux est la bienvenue pour des médias qui sont en crise.
Il n’y a pas de doute, il y a crise dans le modèle d’affaires traditionnel des médias au Québec et au Canada. L’industrie des nouvelles est en crise profonde partout dans le pays. Dans un rapport publié en 2017 intitulé The Shattered Mirror, le Forum des politiques publiques a estimé que depuis 2011, il s’est perdu 30 % des effectifs de journalistes au Canada. Depuis 2010, 27 quotidiens et 225 hebdomadaires ont fermé leurs portes. Les revenus publicitaires des quotidiens ont plongé entre 2006 et 2015 de 2,75 milliards à 1,3 milliard de dollars. Google et Facebook se sont emparés de 82 % de ces revenus publicitaires. À titre d’exemple, les membres de la galerie de la presse à Ottawa ont atteint en 2016 son plus bas niveau depuis plus de 20 ans avec 320 membres soit 20 % de moins que son nombre moyen de 379 membres. (Robert Lewis, Power, Prime Ministers And The Press. The Battle for Truth on Parliament Hill, Toronto, Dundurn, 2018, 378 p.)
Cela n’est pas sans conséquence pour nos débats démocratiques. Si l’on prend par exemple comme point de repère la participation aux élections générales, nous remarquons que lors du passage du père de l’actuel premier ministre canadien Pierre Elliott Trudeau, le taux de participation électorale avoisinait 75 % alors qu’en 2008, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a été élu avec un taux de participation de 59 %. Cela s’est légèrement amélioré en 2015 alors que le succès de l’actuel premier ministre canadien, JustinTrudeau, a fait sortir le vote des jeunes et a permis de renouer avec un taux de participation de 68,5 %.
C’est pourquoi nous pouvons nous réjouir de l’aide qui sera apportée aux médias par les gouvernements. Néanmoins, nous aurions aimé que l’aide financière gouvernementale soit plutôt ciblée vers la pratique d’une presse libre, démocratique, diversifiée et régionale plutôt que sur une aide ciblée aux vieux modèles d’affaires des médias d’information. Subventionner de vieux modèles pour les aider à joindre une économie numérique est injuste si l’on ne fait pas place aussi à une aide pour de nouveaux joueurs, des Médiapart québécois et canadiens. L’aide des gouvernements est bienvenue, mais elle demeure loin de l’objectif souhaité. Ceux que cela intéresse, je consacre ma chronique de mercredi prochain à ce sujet dans EstriePlus.com.